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Les plaines noires

Dans mon insouciance, j’ai beaucoup gambadé
Dans une jungle avec des arbres mirobolants et scintillants
Dont les branches regorgeaient de feuilles cadavériques
Des feuilles par milliers comme une chute d’automne
Dans la lumière enflammée et une atmosphère sereine

Puis, je fus expulsé de cette jungle
Contre mon gré et par mes faiblesses
Le long d’un chemin sinuant
A la dérive, sentant le glissement qui venait
Cachant l’inquiétude qui tremblote dans l’âme

Et une lumière aveuglante me frappa
A la sortie de cette jungle luxuriante
Un désert à perte de vue
Des plaines noires soulignant l’horizon
L’air enflammé et la respiration fut étouffante
Je regardais derrière moi
Cette jungle qui se rapetissait
Comme le paysage d’un monde réel
Dans le trou du lapin

Et je me suis à errer
Sur ces plaines noires, regardant de tous les cotés
Ne trouvant que des échecs dans les quatre points cardinaux
Mais où suis-je arrivé ?
Je voyais parfois des ombres
Evanescentes dans leur pensée
Et ridicules dans leur posture
Elles gambadaient joyeusement
Elles s’imaginaient toujours insouciantes
Dans cette jungle florissante

Alors que leurs corps se décharnaient
A vue d’oeil par un soleil souriant et impitoyable
Le sommeil me fuyait sur ces plaines noires
Me réveillant angoissé, par des centaines de cris
Se débattant dans mes entrailles
Me disant que tout est fini, tout est perdu
La tempérance est partie, l’argent n’est plus qu’un mirage
Une chimère, achetant milles et une bêtes imaginaires

Et je me suis à prier
Tous les dieux et déesses
Qui daignaient m’écouter
Certains me plaignèrent
M’envoyèrent une averse rafraichissante
Mais les plaines noires ont soif
Soif de tout, les quelques gouttes divines
Etaient aspirés à la vitesse de l’éclair
Nous aussi, on en veut, nous aussi, on est affamé
Me criaient-elles, me hurlaient-elle dans mon âme

Et je commençais à courir
De droite et à gauche
De haut en bas
Cherchant un refuge
Des trous ou des lacs artificiels
Rien de rien, je ne trouvais que la turpitude
Des uns et des autres
Je trouvais les fous, toujours les mêmes ombres
M’éclatant de rire au nez, me disant que je suis le fou
Et qu’eux, ils n’ont jamais quitté cette jungle florissante
Mais où est-elle, a-t-elle jamais existé ?
Ou n’était-ce qu’un mauvais tour ?
Joué par les plaines noires en s’humectant les lèvres
Bavant de plaisir devant mon malheur éternel
Ma solitude qui monte jusqu’à la Voie lactée

Mon corps s’assombrit
Mes doigts glorifièrent le charbon
Mes yeux devinrent allergiques
A la lumière des archanges
Qui m’avaient averti
Sur les dangers de cette jungle
De ne pas trop s’y attarder
De peur de ne plus comprendre
Que les plaines noires ont beaucoup de visages
Qu’elles sont partout, avant notre naissance et après notre mort
Elles ont englouti nos parents
Nos ancêtres, nos femmes, nos mères et nos soeurs
Et elles engloutiront nos enfants
Qui se réveilleront un jour
Le visage effaré et douchant de larmes
De se rendre compte que leur chatiment
Et d’errer toute leur vie sur les plaines noires
Avant de rentrer un jour vers les collines blanches sous un fugace lever de soleil

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