La douceur de vivre


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  • Des souvenirs d’enfance, des scènes nostalgiques pour contraster avec le monde de merde qu’on nous impose aujourd’hui.


    L’un de mes souvenirs d’enfance est un samedi après-midi. On achetait des pistaches en kapoka dans la rue, on prenait de la citronnade ou de la limonade et on traçait en ligne droite jusqu’à la mer. Le soleil tapait fort, il était merveilleux, la lumière était éclatante et il y avait cette insouciance dans nos têtes. Tout ce qui nous intéressait était de profiter de l’instant présent. On était fauché, on se moquait de nous, mais on était heureux.

    Ce même frère, qui est mort aujourd’hui, je vais le retrouver dans un autre de mes souvenirs. Quelques années plus tard, on déménage pour avoir une vie meilleure dans une petite ville, situé aussi au bord de mer. Cela ne se passe pas comme prévu, on nous emmerde encore et encore. On avait une grande maison et cour. Et malgré qu’on nous traitait comme de la merde, un autre souvenir est celui de mon frère qui vendait des citrons dans la rue. Il les cueillait dans notre citronnier, il installait une petite table dans la rue et il les vendait aux passants.

    Quand j’y repense, il avait une humilité incroyable, car on pensait être de la caste dominante. Aucun membre de notre communauté, même aujourd’hui, ne s’abaisserait à vendre dans la rue. Mais lui, il le faisait naturellement. A aucun moment, il ne sentait la moindre gêne, il faisait ce qu’il voulait à sa façon. Après la mort de notre père, on nous déménage quasi de force dans cette capitale maudite où tout va à 100 à l’heure. Et j’y suis encore, quasiment 25 ans plus tard, à vivre dans une baraque de merde qui tremble au moindre passage des camions, infestés de toutes les puanteurs humaines et autres.

    Mais pendant toutes ces années, un autre souvenir est cher à mon coeur. Les boums des années 90 et 2000. On ne se rencontrait pas sur le web puisqu’il n’existait pas. Généralement, on profitait des anniversaires ou des communions pour gouter les premiers amours de l’adolescence. Avec le recul, je sais que la lutte des classes, qui est riche, qui est fauché, qui est moche, qui est beau, frappait de plein fouet ces rencontres. Les filles belles, les riches se les tapaient et nous, on n’avait rien. Mais l’ambiance était douce, il n’y avait pas d’arrière-pensée, le monde était beaucoup plus simple.

    Un autre bon souvenir est lorsque j’ai fait mon auto-école. Bon, je ne conduis plus, car pendant ma première vraie conduite après le permis, j’ai renversé un cycliste. Cela vous dissuade à jamais de prendre le volant. Mais je garde un bon souvenir de cette auto-école. Les autres élèves étaient tous des gens qui avaient passé le pac (moi, pas) et ils avaient cette force de la jeunesse qui pouvait décrocher les étoiles. Les filles étaient belles, avenantes, tout se passait bien.

    Le monde d’aujourd’hui est laid à en crever comparé à ces souvenirs. Tout est bétonné, grillagé, électrifié, barbelé, la moindre interaction est analysée. Nous vivons dans des prisons où nous avons planté nos propres barreaux. Nous sommes laids à l’intérieur comme à l’extérieur, nous sommes écoeurants envers nos prochains, nous détestons tout le monde. Nous sommes plus cyniques à chaque jour qui passe et les cyniques deviennent de grands lâches.

    On dit souvent qu’à l’approche de la mort, on se revoit des moments de sa vie passée. Peut-être que je vais bientôt partir pour les collines verdoyantes baignées par un soleil fugace à l’aube du jour. Même une vie de merde est interrompue par des petits moments de bonheur et c’est ce qui compte à la fin de tout.

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